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Un docu qui donne envie de se bouger

Article Ensemble

Ensemble, un autre regard sur la différence

Ce magnifique documentaire porte un regard jeune, bienveillant et bien vivant sur les personnes âgées en institution. Loin des clichés tristes sur les maisons de retraite, on voit ici des aînés plein de vie, malgré le poids et les signes de l’âge.

En vie parce qu’ils sont en lien, que des personnes les aiment, s’occupent d’eux, leur laissent toute leur dignité d’hommes et de femmes, etc. Un film qui donne envie de vieillir heureux.

Personnes âgées : l’amour en mémoire

II et elle sont mariés depuis près de 40 ans. Aujourd’hui, tous les deux en maison de retraite,atteints d’Alzheimer. Tous les jours, ils se croisent et à chaque fois, c’est le coup de foudre. Se font la cour, s’échangent des œillades, se tiennent pudiquement par la main. Avant de regagner leurs chambres respectives et de s’oublier. Cette histoire, Jacques Meaudre la raconte avec tendresse. «Voilà ce qu’était pour moi la maladie d’Alzheimer. Une maladie de l’instant, qui efface tout. Sauf l’amour.» Depuis cinq ans, Catherine Hamois, comédienne, et lui, membres de l’association charentonnaise Aiguemarine, donnent des spectacles dans les maisons de retraite,foyers pour personnes âgées et autres hôpitaux de gériatrie. Dans plus de 150 établissements, ils ont appris à connaître ces «patients» qui passent leur temps à attendre, on ne sait même plus quoi. C’est pour une de ces représentations qu’ils poussent la porte du Forum Jean Vignalou, centre d’animation thérapeutique de l’hôpital Charles-Foix à Ivry. Un endroit où «les personnes âgées s’expriment, donnent leur avis même si elles ne se souviennent plustoujours qui elles sont». Le déclic. Après le spectacle, ils se lancent dans un projet de deux semaines de tournage d’un documentaire pour raconter ce lieu atypique. Ils n’en repartiront que deux ans plus tard.Comme happés, aspirés. «Oui, on s’est un peu laissé déborder, confesse Jacques (rires).» C’est leur plongée dans cet univers dont témoigne le film « Une grande bouffée d’amour!», comme une proposition

de réflexion pour mieux appréhender et ainsi accompagner la maladie d’Alzheimer. L’intérêt, c’est d’abord de comprendre, guidé par les mots de Sylvain Siboni, psychologue, responsable de la structure. Comprendre cette pathologie, synonyme de morts sociale et affective avant l’heure.
Elle qui laisse des lambeaux entiers de soi en route : son équilibre affectif, psychique, sa reconnaissance sociale, ses potentialités intellectuelles, «un peu comme si vous aviez des outils abîmés pour bricoler». Sans oublier la touche «enregistrement des événements récents» qui ne s’enclenche plus.

Avec l’angoisse, «gasoil du moteur de toute maladie mentale», qui habite en permanence celui qui est assailli par des troubles de l’orientation spatiale, temporelle et identitaire. «Or, savoir où et qui on est, c’est se savoir hors de danger», explique le psychologue. Avant de conclure : «Alzheimer, c’est d’abord une maladie de la communication, où l’individu se retrouve seul avec lui-même.» Son remède ? Aimer et communiquer. Et au Forum, «lieu d’utopie institutionnelle», la pratique rejoint la théorie au cours d’ateliers de danse, de musique, de cuisine.

Et ça parle, et ça répond et ça rit. Et ça vit. Avec le concours de personnels dévoués qui ont compris que cette maladie nécessite des bras, du cœur, des regards. Jacques le précise d’emblée : lui, le metteur en scène, n’a justement rien «mis en scène». Pas de deuxième prise, pas de pose. 100 % sur le vif. Pour y parvenir, avec Catherine, ils ont dû se faire accepter, entrer par la petite porte, sur la pointe des pieds. Rien à voir avec des voleurs d’images. Ils ont su poser la caméra pour, sans s’en rendre compte, participer au quotidien du Forum. Apprendre les petits noms de chacun, comme ils l’ont toujours fait pour leur spectacle -pas trop dépaysés en somme. Et là, une fois reconnus, ils ont mis en boîte des trésors, offerts par ceux qu’ils racontent, aujourd’hui encore, par leur nom

Germaine, surnommée «Mon capitaine, mon capitaine» ; Georges, menuisier de son état, ému à l’évocation des p’tits jeunots auxquels il a enseigné son métier. Ils les ont entendus crier leur ras-le-bol» de ce microbe de la vieillesse», leur mal- être parfois. La caméra a capturé d’innombrables moments . Des mains qui se touchent. Des lueurs de don de soi. Entre soignants et patients. Entre patients eux-mêmes. Des ralentis, des gros plans qui laissent comme un arrière-goût d’isolement et de solitude. Immédiatement suivis d’images pleines de vie, d’enfants, de couleurs. Comme pour mieux décrire cette maladie «poétique», selon Catherine qu’une patiente a dite, «belle comme un monastère».Un film donc, mais pour qui ? Pour les familles, les proches, les aidants et pour «tous ceux qui travaillent aux côtés des personnes âgées sans trop savoir ce qu’est réellement Alzheimer», explique Catherine. «Leur apporter une connaissance qui les valorise dans ce qu’ils font et ainsi leur rappeler que leur métier, c’est beaucoup plus que «gardiens de vieux.» Beaucoup ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. Récompensé par le premier prix au festival national Handica 2005 dans la catégorie information, le film a en outre été salué par la Fédération nationale de gérontologie. Redonner et rendre de la vie, leur permettre de transmettre à nouveau. «Nous faisons de l’accompagnement de fin de vie de gens qui, je le rappelle, ne sont pas encore morts ! lance Sylvain Siboni. Ils ont des choses à dire.» Et de conclure : «Les vieux, ils peuvent faire du boucan. Il faut qu’on les entende !»

Gladys Lepasteur

Une sacrément belle «grande bouffée d’amour»

Une belle expérience de vie peut elle naître d’un malentendu ? Cela semblerait être le cas, puisque le jour où Jacques Meaudre a eu l’idée de réaliser son film d’information sur la maladie d’Alzheimer, il était, en fait, allé rencontrer des personnes âgées en maison de retraite pour s’imprégner de témoignages et d’histoires de vies qu’il souhaitait immortaliser par le biais d’un reportage. C’est alors qu’il s’est engagé dans un projet radicalement différent de celui initialement prévu : envie d’en savoir plus, d’en faire plus et surtout d’en faire savoir plus… tout cela déclenchait , avec le soutien de la Région Ile de France, la réalisation de ce magnifique documentaire de deux fois vingt six minutessur la compréhension et l’accompagnement de la maladie d’Alzheimer.« Une grande bouffée d’amour » voyait le jour. Un 1er prix bien mérité. Le résultat est là : un magnifique reportage sous forme de témoignage, un travail de fond dans le respect de la personne, une approche sensible mais réaliste, un très beau moment d’humanité sur fond d’expérience thérapeutique, qui a, très justement, été récompensé par le « 1er prix du 2e Festival National Handica 2005 dans la catégorie information

Evelyne Ramelet

Jacques MEAUDRE, Réalisateur

Avec deux films sélectionnés, il participe au programme des films traitant du rôle de la personne âgée ou handicapée. Le salon est-il un événement privilégié pour présenter vos films ? Il existe peu de lieux pour diffuser des films qui présentent des expériences positives et ne se cantonnent pas à une réaction immédiate et limitée dans le temps, liée à une actualité tragique ou à l’adoption d’une nouvelle législation. Il ne s’agit pas de tout révolutionner, mais de porter le témoignage d’initiatives et de personnes motivées et dynamiques dont on ignorerait l’existence autrement.
Le risque n’est-il pas de n’avoir qu’une vision idyllique ? A travers l’ensemble des films de la sélection, la volonté est de faire partager des points de vue qui se confrontent ou qui se complètent. Pour les professionnels en contact avec les personnes âgées ou les malades, c’est l’occasion d’avoir une « piqûre de rappel». Dans ce domaine l’abondance d’information ne peut pas nuire.

M.Q

Un film sur la maladie d’Alzheimer

Un film sur la maladie d’Alzheimer AU CONTACT des patients, Catherine Harnois et Jacques Meaudre ont souhaité en savoir plus sur cette maladie. Ils ont été notamment attendris par l’histoire d’un couple au forum Jean-Vignalou, de l’hôpital Charles-Foix d’Ivry. « Il et elle sont mariés depuis 40 ans, ils vivent en maison de retraite, atteints de la maladie d’Alzheimer. Tous les jours, ils se croisent et à chaque fois, c’est le coup de foudre, ils s’échangent des œillades, se tiennent pudiquement par la main. Puis ils gagnent chacun leur chambre et s’oublient.C’était cela pour moi, la maladie d’Alzheimer. Une maladie de l’instant qui efface tout, sauf l’amour!» Catherine et Jacques ont alors eu l’idée de réaliser un documentaire sur ce lieu atypique. Leur travail a duré deux ans. Le résultat c’est un film intitulé « Une grande bouffée d’amour » soutenu par la Région Ile de France. Un document pour comprendre cette pathologie et ainsi mieux accompagner les patients. Un outil qui sert aussi bien les familles, les proches que ceux qui travaillent aux côtés des personnes âgées sans trop savoir ce qu’est réellement Alzheimer. A l’heure actuelle, l’association travaille sur un nouveau documentaire centré sur le vécu des familles face à la maladie. H.D